Les plus littéraires d’entre nous diraient "voilà un bel oxymore" (les autres iraient vérifier ce que c’est). Et ils auraient sans doute raison !
En effet, le Home Office s’est récemment installé durablement dans notre quotidien et confond nos vieilles habitudes... parfois même nos réflexes de travail (échanges, temps de pause, etc). Les agendas entre collaborateurs, les aléas quotidiens sont déjà compliqués à maîtriser en temps normal, cette nouvelle distance du télétravail n’arrange pas les choses. Il est donc très important de fixer des règles claires, d'entrée de jeu, pour atténuer le risque d'incompréhension ou de frein communicationnel entre collaborateurs.
Au cœur du dialogue avec son équipe, le manager aura donc un rôle déterminant pour définir clairement la place de chacun dans ce nouveau processus, et les guidelines qui en découlent. Parmi les éléments à clarifier, certains tomberont peut-être sous le sens :
Afin de rendre l’expérience plus pérenne (et agréable), il est donc nécessaire d’adapter et adopter certains réflexes, qu’on soit collaborateur ou manager.
Au bureau, être disponible est normal. Quand le télétravailleur est chez lui, il n’est pas libre de la même manière.
Clara, psychologue du travail, Huffpost
Il n’y a pas très longtemps une journée de travail, dite “classique”, était naturellement rythmée par l’atmosphère d’entreprise et le cadre fixé par son employeur. Dorénavant, un nouvel espace de travail s’est invité dans notre quotidien, souvent compliqué à appréhender, car nouveau.
Puisque nos espaces se mélangent, il est facile que nos tâches fassent de même.
Sur le court terme, on y trouverait presque satisfaction… avant de se laisser envahir, si la situation s’éternisait ! La frontière est mince entre le pro et le perso et donc très importante à définir. Dans la mesure du possible, il faut solliciter ses collaborateurs sur les heures de travail habituelles et éviter plus que jamais les horaires “improbables”.
Une fois la journée finie, il est important que la personne qui travaille à domicile ait l'impression de quitter le bureau et donc le cadre pro, même chez elle.
Pour respecter les contraintes horaires, rendez-vous ou temps de réflexion privilégiés de chacun, il faut une visibilité sur ces temps forts. Tenir ses collaborateurs informés de ses missions quotidiennes permettra de limiter le mélange/la superposition des tâches, souvent transformés en anxiété et en syndrome “charette”. Un bref résumé de sa journée avant de l’entamer et/ou un agenda régulièrement tenu à jour seront deux moyens redoutables de s’en prémunir.
Aussi, en se définissant des plages horaires dédiées à certaines tâches, les collaborateurs seront plus en mesure d’évaluer la charge de travail à prévoir et de la répartir sur leur semaine comme ils le souhaitent. Les plus organisés iront jusqu’à changer leur émoji Slack, même lorsqu’ils font une pause-café ! Des outils comme Trello sont également très sollicités pour organiser sa charge de travail, et ce, de manière collaborative.
Votre agenda partagé doit toujours être à jour ! (...) Comme ça, aucun risque qu’on vous dérange alors que vous êtes sur quelque chose d’important ou qu’on s’impatiente d’une réponse que vous n’envoyez pas.
Bertrand Duperrin, Head of People & Operations Emakina
Si au début on prend plaisir à se mettre en pyjama devant son ordinateur, on risque vite de se sentir désorienté par rapport à l’image que l’on se fait de soi, d’une vie active épanouissante.
Mostafa Massid, psychologue, L’observateur
En fonction du lieu choisi, notre concentration ne sera pas la même. Si la tentation d’occuper l’espace le plus chaleureux est importante, il faut tenter de reproduire au maximum une atmosphère de bureau (en profitant des avantages de son chez-soi : espace, tranquillité).
Dans la mesure du possible, choisir un endroit calme et fonctionnel où la présence des autres est la plus limitée, ce qui vous empêchera de vous prendre au jeu d’une conversation (trop) plaisante ou de perdre le fil de vos pensées. Vous pouvez également disposer vos affaires de travail comme au bureau pour créer une condition psychologique favorable au travail.
Le Head of People & Operations d’Emakina rappelle ainsi : “On ne travaille pas bien et efficacement allongé dans son lit, assis ou allongé dans son canapé”. L’attitude et la posture peuvent en effet également influer sur notre efficacité. La psychologie y joue pour beaucoup et la tenue vestimentaire contribue, bien qu’on l’ignore souvent. Il faut donc là aussi, s’habiller comme si on se rendait sur son lieu de travail, pour ne pas s’entraîner dans un laisser-aller déconstructeur.
Le télétravail a souvent exacerbé tous les petits dysfonctionnements qui existaient avant, et qui pouvaient être résolus de manière informelle en présentiel.
Nadine Bourgaux, psychologue, La Dépêche
Rien de plus désagréable que de passer des heures à chercher où on a bien pu lire tel message ou telle information… Lorsque nos échanges se déroulent uniquement en ligne, la pagaille peut vite s’installer entre un e-mail, Slack, WhatsApp, etc. Planifier des canaux en fonction de leur utilité et hiérarchiser l’information seront donc deux points essentiels pour fluidifier les échanges. Un Slack peut par exemple s’utiliser pour un conseil, une action brève ou instantanée, là où l'e-mail sera privilégié pour une action ou une conversation plus importante avec son destinataire.
L'entreprise aura donc son rôle à jouer pour établir des process clairs pour démystifier et organiser l’utilisation de tous les outils disponibles.
On a tendance à considérer que seul le salarié puisse être chamboulé par ce nouveau modèle, c’est (bien-sûr) faux ! En réalité, le rôle de manager est aussi extrêmement challengé par la situation. Il doit redéfinir ses interventions / sa communication avec ses équipes et veiller sur leur mobilisation, par un accompagnement qui devra coïncider avec ses enjeux business.
Aussi, afin d’y parvenir, voici quelques astuces repérées chez nos clients :
L’isolement et la perte de lien social peuvent être des conséquences naturelles du télétravail, ce qui sur le long terme peut mettre à mal la motivation. Le manager a alors un rôle à jouer en créant par exemple un esprit collectif “virtuel” indispensable pour éviter qu'elle ne s'érode ! Comment ? En créant des échanges réguliers, comme des petits-déjeuners virtuels à heure fixe, ou en organisant des têtes à têtes aléatoires (via Random Coffee sur Slack par exemple). Réinventer l’espace « machine à café » est également un moyen de créer des temps d’échange moins formels, via WhatsApp, Messenger, etc.
Lorsqu’on achève une mission en télétravail, la satisfaction du travail bien fait peut perdre en saveur du fait de la réduction du lien social. Aussi, partager ses bonnes nouvelles est un bon moyen d'entretenir un lien (ou liant) avec ses collaborateurs. Les compliments (mérités) et le rappel des objectifs fixés, des engagements tenus sont particulièrement salutaires pour l’émulation de groupe. Enfin, la pratique d'une activité physique collective peut s'avérer être un parfait stimulateur de motivation. Des solutions comme Gymlib ont récemment façonné leur offre pour maintenir des performances sportives grâce à des cours en ligne.
Ce sont autant d’outils à la disposition du manager qui lui permettent de maintenir un lien avec son équipe et de garder la motivation au beau fixe.
La réaction liée au Home Office est aléatoire d’un individu à l’autre. Certains s’épanouiront, d’autres superposeront leurs angoisses !
Toujours est-il que l’absence de lien direct peut facilement engendrer un retranchement dans nos erreurs. Il est donc important pour le manager d'ouvrir le dialogue, de départager la faute de l’erreur, et de traiter chacune d’une façon bien distincte. Dans le cas contraire, ce manque de dissociation peut grandement détériorer la motivation ! Le manager doit être plus que jamais présent pour repérer les difficultés et y remédier.
En télétravail, il arrive plus fréquemment qu’un collaborateur ait un problème sans que personne ne le réalise ! Le manager aura donc tout intérêt pendant cette période à présenter des solutions claires pour les affronter. D’abord, en tête-à-tête, pour confronter le problème à deux et tenter d’y résoudre ; ensuite, en faisant appel à l’intelligence collective, pour trouver des solutions plus rapides/pragmatiques.
Pour que le droit à l’erreur au travail fonctionne, il faut commencer par expliciter les règles du jeu à tous les collaborateurs.
Charles de Fréminville, CEO de Bloom at Work
En l’absence de contact direct avec ses collaborateurs, le manager peut avoir tendance à surcontrôler leurs actions, ou à l’inverse, les oublier, noyé dans ses propres missions. Le suivi est très important, car il assure un moment privilégié et régulier d’échange et d’analyse pour les deux parties (souvent hebdomadaire). Les OKR’s, dont l’utilisation est largement répandue dans l'écosystème startup, prennent tout leur sens.
Ces objectifs encouragent le collaborateur à faire un rapport de ses actions, au niveau micro, et obtenir un retour de son manager pour l’aider à avancer sur d’éventuels blocages, l’encourager sur ses progrès. Ils permettent aussi souvent au télétravailleur de se conditionner pour passer de l’idéation à l'exécution.
On parle souvent de méthode SMART (specific, measurable, attainable, relevant, time based), lorsqu’on souhaite en faciliter la prise en main, comme le reporting, en maintenant un incentive suffisant.
Chez Avizio, on a mis en place des routines assez simples. En fin de semaine, le manager fait un point avec les membres de son équipe pour discuter des blocages, des choses qui n’ont pas pu être faites, celles qui seront faites la semaine suivante, etc. Cela permet de lever les doutes, d’obtenir de l’aide et surtout de communiquer. Nous avons aussi des “morning coffee” le matin pour se dire bonjour et faire part de demandes sur les tâches de la journée. Ou encore des apéros en visio pour finir une journée l’esprit léger.
Sun Tzu disait de ses soldats : « Qui connaît l'autre et se connaît lui-même, peut livrer cent batailles sans jamais être en péril. Qui ne connaît pas l'autre, mais se connaît lui-même, pour chaque victoire, connaîtra une défaite ». Pour le manager dépourvu de contact avec ses équipes, il est indispensable de prendre la température sur le moral ou la santé de chacun. Il peut par exemple profiter d’un tête-à-tête plus informel pour ouvrir la possibilité de poser les questions qui les préoccupent et y répondre. Aussi, si le tact est important en physique, il l’est doublement en home office. On ignore tout de ce qui peut se passer chez nos collaborateurs, alors, notre meilleur conseil : interagissez avec eux comme vous auriez envie qu’ils interagissent avec vous ! N'oubliez pas les émojis sur Slack par exemple, ça change souvent le sens d'une phrase ;)
Bien que le télétravail se réservait à l’origine au court terme (pour le bien de la distanciation sociale), son expérimentation permet désormais de l’envisager de façon durable. Certains se laissent même aller à des pronostiques imaginant que l’organisation du travail allait évoluer durablement en intégrant le télétravail. Cette étude montre d’ailleurs que 83% de télétravailleurs sont aujourd’hui défavorables à l’idée de reprendre un rythme présentiel à temps plein.
Toutefois, le sentiment général ne semble pas encore figé, car depuis la fin de l’année 2020, la tendance “full remote” ou 100 % télétravail n'est pas complètement acquise non plus, où seul un tiers s’estiment pleinement satisfaits par ce modèle.
L’avenir nous le dira, mais il y aura clairement un nouveau rythme à trouver pour les salariés et il semblerait que chacun ait son avis sur la question. Verrons-nous un modèle hybride qui réconcilie les adeptes du présentiel et du télétravail ? On retrouve dans la même étude 63% d’opinions favorables à ce rythme hybride.
En Angleterre, certaines boîtes organisent des cours de Yoga et de méditation en visioconférence avec des profs très qualifiés pour les team members volontaires ! Les feedbacks ont été très bons et il n’y a pas forcément besoin d’être un yogi pour apprécier.
Chez nous, toute l’équipe se réunit chaque semaine pour donner de la perspective business et l’opportunité à certains de donner un aperçu de leur travail. Des team survey sont également envoyés pour mesurer l’engagement et la satisfaction en interne (Culture Amp).
Le projet d'entreprise est primordial pour fédérer des équipes, encore plus à distance. Il doit donc être clair et les objectifs qui en découlent atteignables. Il est parfois nécessaire de le jalonner pour le rendre plus accessible. De plus, le top management et les RH jouent un rôle clé pour accompagner les équipes dans cette période, en les guidant sur les comportements à adopter dans le respect des valeurs de l’entreprise.
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Il est à noter que cet article n’est pas indexé aux réglementations en vigueur. Bien entendu, dès que cela est possible, privilégiez les mesures de distanciation sociale.